Un Deutz D 30 ‘automatisé’

Imaginez un petit entrepreneur de sciage de bois qui sillonne la campagne environnante pour se rendre chez sa clientèle locale avec son tracteur Deutz D30 attelé à une scie circulaire. C’est M. Carteret, aujourd’hui décédé, qui habitait dans le petit village de Poyan.

Pour être totalement indépendant, opérationnel rapidement et efficace, il a entièrement équipé son Deutz D30, acheté d’occasion dans les années 90, d’une scie circulaire de fabrication maison, à laquelle il a ajouté un tapis d’évacuation du bois scié, également de sa fabrication. Ce petit tracteur a effectué sa seconde vie en sillonnait les routes pour aller de client en client.Carteret va encore aller plus loin en réalisant un relevage mécanique de ce tapis, le tout étant exclusivement fabriqué avec des éléments de récupération. Disposant de moyens très modestes, ne disposant pas d’un outillage énorme, tout est assemblé par boulonnage. Il en résulte un incroyable ensemble qu’il fallait savoir dompter.

Pour ne pas faire des aller retours incessant entre le poste de conduite et la scie, l’ensemble des commandes a été doublé et déporté à l’arrière, de manière à commander l’embrayage, le relevage et l’accélérateur du Deutz D 30 depuis la scie. Cela lui permet, une fois en poste à côté du tas de bois, de mettre en marche et d’arrêter la scie sans accéder au poste de conduite.

L’ensemble est très rocambolesque, fait de bric de de broc, mais tout est fonctionnel, jusqu’ à la plume trempée dans l’huile qui repose sur le bord de la cabine permettant de lubrifier la scie.

Pour diminuer le bruit mais surtout éviter les étincelles, l’échappement d’origine a été doublé d’un énorme tuyau de poêle. Le lestage avant est réalisé par un bloc d’acier fixé sur un ancien berceau de protection de la calandre. On peut passer un bon moment à ausculter l’ensemble des astuces qui ont rendu cet ensemble de sciage si original.

Le D 30 a la robustesse et la simplicité des Deutz des années 60. C’est un tracteur sans histoire qui démarre sans souci quel que soit le temps, contrairement à bien des concurrents. Il ne tombe jamais en panne. Son petit bicylindre avait un appétit d’oiseau, ce qui donnait un coût très modéré à l’usage. La cabine, du commerce était-elle proposée par le concessionnaire Deutz pour le D 30 ou a-t-elle été adaptée ? En tout cas, si elle a l’avantage d’être spacieuse, elle est bien imposante pour le tracteur et ne met pas celui-ci en valeur. Néanmoins, elle a protégé M. Carteret des intempéries pendant des années.

Que dire de plus si ce n’est que Deutz qui représentait de l’ordre de 5% du marché dans les années 60 fait partie des marques qui sont prisées par les utilisateurs pour une seconde vie, où ils sont très appréciés pour leur facilité d’entretien, leur robustesse, leur coût modique à l’utilisation, et surtout leur démarrage facile quel que soit le temps. Le refroidissement par air évite les risques de fendre un bloc moteur, la construction modulaire permet des dépannages peu couteux, les pièces Deutz sont facile à trouver. Bref, que des avantages. On peut noter que la peinture d’origine n’est pas totalement défraichie, que les marquages dorés sur le capot sont encore en place, y compris ‘refroidi par air’, que Deutz apposait sur tous les capots à l’époque, pour bien mettre en valeur les énormes avantages que ce mode de refroidissement apportait.

Cet exemple nous montre l’attachement de la clientèle Deutz à ses tracteurs, qui sans avoir été forcément bichonnés restent en bon état et assument de nombreuses tâches pendant des décennies.